Internet pollue et pas qu’un pneu !
Premier article d’une série sur un sujet qui me passionne et qui, bien que très documenté scientifiquement, est très peu médiatisé.
J’ai eu l’occasion de pitcher une bonne cinquantaine de fois le projet de Labanqui.se et, à quelques rares exceptions, tous mes interlocuteurs tombaient de l’armoire en découvrant la vérité sur la pollution engendrée par notre utilisation d’internet.
N’ayant pas toujours un temps infini, j’ai décidé de présenter les impacts de cette dernière avec 2 informations.
En 2020, avant-hier donc, Internet a pollué autant que l’aviation civile.
Dès 2025, après-demain donc, Internet va polluer autant que l’automobile.
Comme le dit le Shift Projet dans son rapport, dont vous trouverez le lien en bas d’article et dans son style bien à lui :
Le numérique, tel qu’il est conçu et utilisé aujourd’hui, évolue selon des dynamiques qui sont incompatibles avec les contraintes inhérentes à des ressources finies .
En 2019, près de 4 % des émissions carbonées mondiales sont dues à la production et à l’utilisation du système numérique. Cela représente plus que les 2 % usuellement attribués au transport aérien civil et, avec une augmentation qui s’élève aujourd’hui à 8 % par an, cette part pourrait doubler d’ici 2025 pour atteindre 8 % du total – de l’ordre des émissions des voitures et deux-roues actuellement.
Pour avoir fait l’exercice très régulièrement, et pas qu’en visioconférence, je suis arrivé à la conclusion que cette information, bien qu’assez simple à saisir, est inadmissible, au sens premier du terme, pour notre cerveau, tant elle parait impossible.
Le paradoxe est le suivant, en plus ça permet de citer Nicolas Hulot :
lorsqu’on utilise un ordinateur, on a plutôt le sentiment que c’est bénéfique pour la planète.
Donc même si c’est compliqué à admettre, Internet va dès demain polluer plus que l’automobile et sera responsable de 8% des émissions de Gaz à effet de serre mondiales.
Comment la simple utilisation d’un smartphone, d’un ordinateur, d’une télé connectée à une box pour me distraire, communiquer voire travailler en temps de Covid, peut au final polluer plus qu’un gros véhicule plein de plastiques, nourri aux énergies fossiles ?
Votre cerveau se joue de vous en vous empêchant d’admettre que d’ici seulement 4 ans, le numérique va polluer plus que l’automobile et pour vous aider à le comprendre, je vous propose de discuter de deux usages peu exotiques :
- Envoyer un email avec une pièce jointe équivaut à laisser une ampoule allumée pendant 1 heure (selon l’ADEME c’est 24 heures mais même si ce n’est que 1 heure c’est déjà impressionnant)
Si comme moi, vous avez des enfants (ou que vous avez été enfant vous-même) et qu’au quotidien vous luttez contre les portes ouvertes et les lampes allumées, phénomène aussi connu sous le nom du syndrome du “C’est pas Versailles, ici !” , il y a de fortes chances que vos « reply-to-all » suite au traitement de vos emails du matin, aient eu plus d’impact que le fait d’avoir laissé la lumière des toilettes allumée pendant 24 heures.
- Regarder une heure de vidéo sur son smartphone équivaut à la consommation électrique d’un frigo pendant un an
Normalement, vous avez rapidement eu en horreur les saisons 1 & 2 de Pat’patrouille, que vos enfants ont binge-watché, pendant que vous découvriez les joies des visioconférences et du télétravail. Ça commence à faire beaucoup de frigos…
La fabrication des smartphones, ordinateurs, serveurs, téléviseurs et quelques milliards d’objets connectés est à l’origine d’une part importante de cette pollution, il convient de s’interroger sur les usages donc sur nos usages.
Peut-on raisonnablement croire que nous allons collectivement restreindre nos envois et stockages de données et réduire de façon drastique notre consommation de vidéos en ligne ?
Qu’une petite partie de la population joue le jeu sérieusement, je l’espère.
Que la majorité de la population rogne sur son petit confort, c’est tout de même moins probable.
En passant, si vous regardez la télé depuis une box ADSL ou fibre, même constat. Idée de cadeau pour la Saint-Valentin : une antenne râteau !
Il y a un fort travail de pédagogie et de sensibilisation à mener autour de ces sujets, qui, de toute façon, nous exploseront au visage, sous une forme ou une autre.
Lorsque nous serons sortis de cette crise sanitaire, puis de cette crise économique, la réaction classique d’un état comme la France, qui découvrira , avec plusieurs années de retard, le côté polluant du numérique, sera évidemment de taxer tout ça.
Cela équivaut à dire qu’après avoir incité les entreprises à se digitaliser à coup de subventions de 500 € pour faire un site click’n’collect (qui ne servira à rien, hébergé sur les plateformes les plus polluantes du monde et développé sans se poser la moindre question sur son impact énergétique), l’état fera preuve d’une grande imagination fiscale pour compenser tout ça.
Parallèlement, d’ici là, il n’aura toujours pas réussi à taxer les GAFA, ça lui fera toujours une petite victoire.
Ce qui me permettra de conclure sur une citation de Coluche, c’est quand même autre chose que Nicolas Hulot… l’ours étant les GAFA, et le lapin, les gentils entrepreneurs français :
Aujourd’hui, c’est la chasse à l’ours. Où cours-tu le lapin ? Tu ne risques rien ! Eh, t’es con ! J’ai pas mes papiers !
Pour en savoir beaucoup plus, je vous invite à consulter 120 pages de bonheur en lisant le dernier rapport du Shift Project sur l’impact environnemental du numérique (Think Tank de la transition carbone dont le président est Jean-Marc Jancovici, ingénieur spécialiste du climat qui devrait finir Ministre de l’écologie dans un futur proche).
https://theshiftproject.org/article/deployer-la-sobriete-numerique-rapport-shift/
Et le toujours appréciable et apprécié rapport sur l’empreinte environnementale du numérique mondiale :
https://www.greenit.fr/2020/06/23/quels-sont-les-impacts-environnementaux-du-numerique-en-france/
Pour finir, en bonus track, l’histoire de mackaycartoon, à qui l’on doit le dessin sobrement appelé Tsunami Covid qui se trouve tout en haut de l’article, qui nous explique comment son dessin est devenu viral et a été décliné/tuné/modifié/amélioré 1680 fois :
https://mackaycartoons.net/tag/2020-09/